mardi 13 décembre 2011

Cauchemars et confiance

J'ai retrouvé, furtivement, ce plaisir que je n'avais plus ressenti depuis longtemps : cette satisfaction de réaliser qu'il sort de moi par écrit, des choses que je n'avais jamais formulée, des idées que je ne me savais pas avoir même pensées ou théorisées. A l'école, j'ai toujours été bien plus douée à l'écrit qu'à l'oral. C'est comme si l'écrit me permettait d'accoucher de mes pensées, de mes opinions. Je ne sais pas mettre en forme une réflexion, elle se révèle à moi lorsque j'écris. Et j'ai retrouvé ce sentiment précis, un de ceux pour lesquels précisément j'ai cette obsession. C'est doux, rassurant, stimulant. 

Cauchemars en ce moment, avec A. et R. dedans. Le passé est encore bien là, on ne s'en débarrasse pas comme ça. Ni des angoisses qu'il a fabriquées. Je rêve que l'on doit passer du temps ensemble mais qu'elles me font du mal, me blessent. Elles sont folles, mais les gens croient autour que c'est moi qui suis folle. Je n'arrive pas à le leur montrer, ça me met dans une rage mêlée de désespoir. 





dimanche 4 décembre 2011

Sylvia

Après des années d'absence, je me suis réinscrite à la bibliothèque. Essentiellement parce que mes finances ne me permettent pas d'acheter toutes les BD que j'aimerais lire. J'ai donc emprunté en tout premier Polina, de Bastien Vivès, principale raison de mon inscription. Je ne sais pas si c'est le chef d’œuvre que l'on dit, mais c'est un très beau livre et un dessin d'une grande délicatesse, émouvant et riche.
Je lis les lettres de Sylvia Plath à sa mère durant ses années d'études. Ce ne sont pas ses plus beaux textes (ce n'est pas l'idée) mais c'est intéressant. Il y a quelque chose d'à la fois fort et triste dans la relation fusionnelle qu'elle entretient avec sa mère. Bien sûr, la publication est passée par le filtre de celle-ci, qui en a fait une sélection, mais au fil du temps, on sent SP glisser d'une totale transparence les premières années à un maquillage plus sombre et plus épais. On suppose la distance qu'elle prend doucement d'avec sa mère, malgré la fusion.
Cet te fille me fascine et m'impressionne beaucoup. Nous n'avons pas vécu à la même époque, pas la même vie, pas la même personnalité (SP éait plutôt exubérante) mais je me sens proche de beaucoup de choses qu'elle exprime. J'ai cette idée d'écrire un livre sur elle, une biographie subjective, sélective, mais elle m'intimide : ai-je vraiment le droit de parler d'elle sans l'avoir connue ? de m'approprier son existence ? ses textes ?

Boulimie

J'ai découvert une nouvelle série : 30 rock. Et comme toujours lorsque c'est le cas et que je passe quelques jours seule à la maison, j'en fais une boulimie. Mais c'est une boulimie douce, qui comble la solitude sans trop de dégâts. 
Je suis sans cesse jalouse de la vie des autres, des amis de Pit, de ses rencontres, de ses échanges. Et hantée par la peur de ne pas être aux bons endroits. Je suis paniquée par l'idée qu'il se passe des choses là où je ne suis pas, lorsque je ne suis pas là. Que les gens se rencontrent, échangent, vivent, là où je ne suis pas. Je voudrais être de toutes les fêtes, de toutes les rencontres (même si je suis souvent déçue), pour ne pas rater ce qui pourrait se passer, pour ne pas qu'on m'oublie. Évidemment, quand je suis là il ne se passe rien. J'aimante le vide. Je ne peux m'ôter de la tête l'idée qu'on ne pense pas à moi, qu'on complote même, la peur qu'on m'évite, qu'on ne m'aime pas. J'ai le sentiment de ne rien avoir à apporter aux autres, d'être insignifiante, inintéressante. 
Je passe mon temps à lutter contre ces idées, mais avoir la preuve tous les dix ans que tout cela peut être vrai, qu'on peut comploter, qu'on peut décider en chœur de ne plus m'aimer, suffit à me terrifier jusqu'à la prochaine fois.

samedi 26 novembre 2011

La psychanalyse est un animal de compagnie

Depuis quelques mois, la psychanalyse est devenue mon chaton. J'y penses souvent, j'en prends soin, elle est là, toujours dans un coin à miauler doucement, à me rappeler qu'elle existe, qu'il faut la nourrir, la caresser et la câliner. Elle est fragile et pas toujours très autonome mais elle est aussi sauvage et quelque fois indifférente. En tous cas, elle es tout le temps là dans un coin de la pièce, dormante ou agitée.


Un coucher de soleil au-dessus des nuages.

mercredi 16 novembre 2011

Solitude


Pit et moi sommes partis pour une semaine en Allemagne, à l'Akademie Schloss Solitude où il est invité. Cela me fait un drôle d'effet d'être entourée de (jeunes) artistes. Des gens de mon âge, qui passent leur journée à créer des musiques avec des bruits d'ordinateur, à dessiner, peindre, filmer, écrire... avec une apparente facilité qui me déconcerte. C'est à la fois motivant et effrayant, fertile et inhibant. J'ai l'impression qu'ils n'ont aucune difficulté à se définir "artiste" (moi j'ai déjà bien du mal à me dire journaliste), à agir comme des artistes, à penser comme des artistes. A se sentir légitimes dans ce rôle. Je les envie.

J'avais une mission toute fraîche. Cela signifiant une nouvelle agence, un nouveau sujet sur lequel travailler, une bonne dose de travail pour ces prochaine jours et aussi un peu d'argent. J'étais enthousiasmée par la nouveauté plus que le travail en lui-même. Et puis finalement, ça ne s'est pas fait, je ne correspondais pas. Je n'ai pas su cerner leurs attentes. Je n'avais pas vu cette éventualité arriver, j'ai été présomptueuse. 
C'est un petit coup à l'ego et aussi au compte bancaire bien sûr. Mais dans le fond, c'est aussi un soulagement. Je suis tout à coup plus libre de faire ce que je veux de cette semaine. Plus libre et donc plus angoissée. 
J'écris et je dessine peu ces dernier temps, mais il me semble que quelque chose se résout doucement en moi. La psychanalyse et mes lectures m'aident. Une urgence se dessine, j'essaie de créer l'évidence, de me débarrasser de tout ce qui me bloque, de tous les renoncements que j'emporte avec moi depuis des années.

La nuit tombe vite ici et l'air est glacial (ça change de la douceur de Nantes), mais tout me semble beau et idyllique.


vendredi 11 novembre 2011

L'Ange du foyer





"Celle qui deviendra schizophrène est déjà double, comme le sont jusqu'à un certain point toutes les filles jeunes et jolies : une tête qui pense, un corps qui éblouit. Une tête qui doit penser au corps comme à une chose qui lui est extérieure, étrangère. Une Zelda [Fitzgerald] qui doit surveiller l'autre : pour plaire."

"Il faut lire et relire sa célèbre description de l''"Ange du foyer", cette femme idéale ("excessivement sympathique", "absolument charmante" et "parfaitement altruiste"), ce modèle d'abnégation féminine, ce parangon de pureté qui, lorsque Virginia s'est mise à écrire, a fait mine de guide sa plume :

Je me suis jetée sur elle et l'ai prise à la gorge. J'ai fait de mon mieux pour la tuer. Mon excuse, si je devais comparaître devant un tribunal, serait d'avoir agi en état de légitime défense. SI je ne l'avais pas tuée, et m'aurait tuée. Elle aurait crevé le cœur de ce que j'écrivais.

L'"Ange du foyer" ressemble à s'y méprendre à la propre mère de Virginia Woolf : philanthrope, belle, énergique et généreuse, mère dévouée d'un famille nombreuse, l'image même de la "bonne" féminité à l'époque victorielle en Angleterre/ Or, une femme qui "tue" symboliquement sa mère, à travers l'acte d'écriture ou autrement, se "tue toujours elle-même aussi. Sylvia Plath a fini par le comprendre, et par décrire ses tentatives de suicide comme "une pulsion meurtrière transférée de ma mère sur moi-même". Elle dit aussi : "Ça me fait un bien fou d'exprimer mon hostilité à l'égard de ma mère ; ça me libère de l'oiseau-panique sur mon cœur et sur ma machine à écrire". 

"Les femmes, même lorsqu'elles désirent ardemment devenir des auteurs, sont moins convaincues de leur droit et de leur capacité à le faire. Pour la bonne raison que, dans toutes les histoires qui racontent la création, elles se trouvent non pas du côté de l'auctor (auteur, autorité), mais du côté de la mater (mère, matière)."

Dans Journal de la Création que m'a offert Pit il y a quelques temps, Nancy Huston parle des rapports entre la féminité et l'écriture, invoquant Zelda Fitzgerald, Sylvia Plath, Virginia Woolf, Simone de Beauvoir. C'est absolument passionnant. 

En ce moment, je tue symboliquement ma mère.

jeudi 3 novembre 2011

L'héritage familial

Cela fait maintenant 10 ans que je m'efforce de m'éloigner de ma famille, consciente d'une incompatibilité qui ne peut être résolue autrement. Je constante aujourd'hui que même si j'ai cru à certains moment en être détachée, elle me poursuit littéralement. Même à 800 km, elle est là, son spectre rode au-dessus de moi, me recouvre de son ombre menaçante. 
C'est un constat terrible de comprendre qu'on ne peut pas mettre paisiblement sa famille à distance, sans douleur et sans rupture ; juste en mentant un peu et en vivant dans son coin. Cela ne suffit pas. Parce qu'en réalité, ce qui nous pèse et que l'on fuit est à l'intérieur de nous-même. Dans leurs yeux et leurs bouches il y a l'incompréhension, le regard désapprobateur, et c'est douloureux, ça m'affecte à chaque fois. Mais dans mes yeux aussi, il y a du jugement, le leur, que j'ai soigneusement intériorisé pendant ces dix-huit années de vie commune. Et contre qui toutes mes constructions intellectuelles, tous les kilomètres entre nous, ne peuvent rien.

lundi 31 octobre 2011

La foule

Hier soir, concert de Bonne Prince Billy (super) au Lieu Unique.

L'égalité ménagère

Je déteste constater combien je suis effrayée par l'idée de reproduire des relations homme-femme inégalitaires. Sans être véritablement assumé, dans ma famille, la préparation du repas, la lessive, le repassage et une partie du ménage, ont toujours été la tâche de ma mère. Tout comme celle de travailler moins pour nous élever. Si elle avait besoin d'aide, c'est toujours moi qu'elle appelait, plutôt que mes frères. Jamais elle ne s'en est plaint, j'imagine que c'était normal pour elle. Mon père s'occupait du bricolage, elle de l'entretien de la maison. Et j'ai peur de reproduire cela malgré moi. D'entretenir moi-même une inégalité, de me sacrifier naturellement, parce que j'ai été élevée comme ça, conditionnée comme ça. Et chaque signe qui pourrait m'en donner l'impression, me met hors de moi, me panique. C'est stupide. Mais je perçois tout à coup combien en pratique  il est difficile de remettre en question une éducation, une norme sociale généralisée. Autant pour les hommes que pour les femmes. Il faut sans cesse penser l'égalité, peser ses gestes, toujours être attentif. Cela n'a rien de naturel parce que justement (et c'est fou), c'est devenu contre-nature.

A lire aussi sur le même thème : Privilège du masculin sur Sexactu.

dimanche 30 octobre 2011

La liberté

Le travail en indépendante me fait quelquefois flancher. L'isolement, la précarité, la peur de tout perdre demain, de s'enfoncer, la nécessité sans cesse de chercher du travail, négocier des tarifs, faire ses preuves, se vendre. Des phrases qui sonnent comme des gros mots pour moi, mais qu'un jour j'ai décidé de préférer aux stages, à l'entreprise, au salariat. Ça n'a pas été un choix facile, laisser tomber les études d'abord, par orgueil, parce que je refusais de me soumettre à un système qui me demandait de vendre encore mon temps et mes compétences pendant 6 mois pour 400 € par mois. Parce que j'avais entrevu qu'on pouvait essayer de faire des choses de son côté, en marge. L'indépendance est arrivée par hasard. Elle est devenue concrète à un moment où je ne faisais que surnager dans le flou, hésitant encore à ruminer ou saluer ma décision.
Depuis trois ans, je m'y suis accrochée. Avec elle est arrivée l'angoisse, la solitude, la procrastination, mais aussi un sentiment neuf et puissant : la liberté. Et si quelquefois je flanche, si je profite bien mal de cette liberté, je me refuse à la vendre contre un CDI, contre un salaire. J'ai réalisé il y a peu qu'elle est l'une des choses les plus précieuses que j'ai acquises, et que quel que soit son prix, et même si souvent je n'en fait rien, elle me permet de rester en éveil, toujours libre d'être obsédée par elle, par les possibilités qu'elle m'offre, toujours propriétaire de mon esprit.

mardi 25 octobre 2011

Une vie à soi



"Ma découverte suivante m'avait appris que même si je savais maintenant ce qui me rendait heureuse, je ne pouvais accéder au bonheur quand je le voulais. Il semblait que d’innombrables obstacles m'enmpêchaient de vivre les yeux ouverts, mais, à mesure que je les suivais à la trace, il apparaissait que leur cause première à tous était la peur." 

"En constatant que pour être de plus en plus consciente je devais être de plus en plus calme, je ne me mis pas seulement à voir avec mes propres yeux plutôt qu'avec des yeux d'emprunt, mais que je finis aussi par découvrir le moyen de m'échapper de l'île ou me tenait prisonnière ma conscience de moi-même."

"Ma découverte sur la nécessité, pour pouvoir me relaxer physiquement, d'être d'abord active mentalement, semblait indiquer que lorsque je me comportais passivement vis-à-vis de mon propre esprit, celui-ci glissait automatiquement vers la tension et l'effort crispé. Il m'apparaissait maintenant que de même que l'impulsion vers la féminité pousse une personne, dans ses relations avec les autres, à une acceptation passive de leurs idées et de leurs points de vue, cette impulsion, dans la relation avec la pensée de la personne concernée pousse à subir passivement l'expérience plutôt qu'à l'observer activement ou à essayer de l'exprimer." 

Quelques extraits des conclusions de Marion Milner dans le fascinant Une vie à soi, un livre qui raconte la quête que l'auteure entreprend à l'intérieur d'elle-même, à la recherche de son inconscient et de ses véritables désirs. J'ai mis des mois à lire ce livre que je termine lentement ce livre, tant chaque phrase est passionnante et donne à penser.


dimanche 23 octobre 2011

Un essai

Une nouvelle ère


Voilà qui entérine les choses. Nous sommes bel et bien chez nous. Il y a des tables, des meubles et les lumières sont plus tamisées. Cela ressemble un peu plus à un doudou. Une nouvelle ère débute, et ici la solitude est une douceur, une gianduja.

lundi 17 octobre 2011

La nature en centre-ville


Quelques balades dans Nantes la semaine dernière. Découvert la promenade qui longe l'Erdre à partir du pont de la Motte Rouge. La pleine nature en centre-ville. Marché jusqu'aux facs, sur le ponton qui longe des maisons en bord du fleuve, traversé sur un bateau-navette. Le campus ressemble à ceux que l'on voit dans les films anglais, les facs sont disséminées entre les forêts et les terrains de sport, les étudiants font de l'aviron ou de la course à pieds le long de l'eau. F. me disait "tu es dans une ville qui prend soin d'elle". C'est vrai, et ça fait du bien.

Un dernier (sans doute, je l'espère) e-mail de A. , une dernière action, même à distance, pour me montrer qu'elle contrôle tout, que je ne fais que subir, m'écraser. Maintenant, il me reste à l'effacer de ma mémoire, me protéger, retrouver confiance, rebondir.

mercredi 5 octobre 2011

Apprendre à nager

J'ai retrouvé le plaisir de lire, après quelques mois vides. Bella Ciao d'Eric Holder (quelle écriture), je termine Une vie à soi, de Marion Milner (une révélation), j'ai aussi commencé le Manifeste d'économistes atterrés, et des livres sur la psychanalyse. Je les égare un peu partout dans l'appartement et pioche régulièrement dedans. Il y a aussi ce livre un peu stupide Gérer les personnalités toxiques, souvent simpliste et pas du tout objectif quand il s'agit de comparer la psychanalyse aux thérapies cognitves (mais la grossièreté de la dissimulation est très drôle), mais qui me fait un peu de bien. F. me disait l'autre jour au téléphone, que j'étais sur la bonne voie. En tous cas, j'apprends à nager lorsque Pit n'est pas là. A ne pas être une ombre sans objet. Les livres me font du bien, ils m'enthousiasment, me donnent de l'énergie, des idées, des envies. Je n'en fait pas forcément grand chose, mais je sais que c'est là.

Nantes a enfin retrouvé son temps changeant et il n'en est que plus beau.

samedi 1 octobre 2011

Un après-midi sur les bords de Loire

Nous sommes venus à Nantes parce que nous aimions ce que nous en connaissions (c'est-à-dire pas grand chose). Au fur et à mesure que nous découvrons la ville, nous réalisons que le reste est tout aussi beau. Ouf !

La confiance en soi, c'est du jardinage

Nouveau week-end toute seule depuis notre départ, Pit est à un salon. Et à chaque fois la même question : vais-je être bien ? Vais-je céder à l'angoisse ? J'apprends à dompter la solitude lentement, mais c'est un petit diable qui rode, qui attend la moindre faille, le moindre temps de latence pour s'immiscer en moi.

Mais l'air est doux aujourd'hui, j'ai trouvé un coffret de disques "Les années folles" dans le vide grenier du quai de Versailles, je travaille. Je fais quelques pas en avant ces temps-ci, doucement. Je m'éparpille un peu, je sème des graines tout autour de moi et je pourchasse la confiance, je la déniche dans les recoins où ses dernières pousses se cachent et j'essaie de la cultiver, de la faire grandir, de l'arroser régulièrement. Je n'ai jamais été très douée en jardinage. Je crois désormais que c'est une question de rigueur et de régularité. Je m'y astreindrai.

dimanche 25 septembre 2011

Le moyen de transport le plus convivial

N'en déplaise à mon bilan carbone, je trouve que l'avion est le moyen de transport le plus convivial. Au-delà du fait d'être enfermé dans une boîte en métal avec une centaine d'autres personnes à 10 000 mètres d'altitude, j'aime l'idée que d'une certaine manière, on participe tous, dans un effort collectif, au bon déroulement du vol. A l’atterrissage et au décollage, on nous demande de rester assis, d'attacher nos ceintures ; on éteint nos téléphones et nos appareils électroniques, on déglutit pour se déboucher les oreilles, et on se concentre, tous ensemble, pour que l'avion ne se crashe pas. C'est un beau moment, presque religieux. Et finalement, on est tellement heureux d’arriver vivant (surtout quand l’avion a atterri brutalement) qu'on a envie de le partager avec les autres, s'exclamer, applaudir, se prendre dans les bras. Bravo, on a réussi.

dimanche 18 septembre 2011

Paris est ma Chine

Cours de yoga, inscription au cours de dessin, abonnement au Lieu Unique, inscription à l'Université Permanente, séances de ciné (La Fée, pas mal mais pas aussi touchant que ne l'était Rumba, et La valse des pantins, génial), réservation de places de théâtre, premières séances de psy, une nouvelle commode, tableaux accrochés, repérage des vide-greniers, bientôt un vélo (croisons les doigts), une nouvelle coupe de cheveux... les choses avancent. Mais certains soirs comme aujourd'hui, j'ai l'impression de piétiner. Je sais qu'il y a mille choses passionnantes à lire, à écrire, à dessiner, mais je n'arrive à rien, j'ai peur, je me sens vide, éparpillée, je ne trouve pas mes mots, pas la force de me rassembler.
Je lis pas mal de livres de psychanalyse ces temps-ci, cela éclaire les choses, rend doucement mes séances moins terrifiantes (et c'est dire si les premières l'étaient), car tout à coup, la psychanalyse n'était plus une idée, un concept, une théorie, cela devenait ma réalité. Je lis aussi Pluie argentée d'Elizabeth Guyon, et c'est un beau livre, touchant et proche. Je ne connais pas la Chine, mais je comprends ce qu'elle ressent, j'y retrouve, dans une autre mesure bien sûr, un peu mon attirance pour Paris d'il y a des années. Venir vivre à Paris était alors une évidence, une urgence. Rien d'autre ne comptait. Et c'est avec cette même urgence que j'en suis partie.

dimanche 11 septembre 2011

Friends

Dès que Pit n'est pas là, la solitude revient m'encercler comme une tornade froide et silencieuse qui ne détruit que l'invisible, le blues affale tout son poids sur mes épaules, mes pensée se perdent dans des constations mélancoliques. Je voudrais résister, supporter la solitude comme avant, réapprendre à l'aimer, en faire une alliée.
En attendant je regarde des épisodes de Friends à la chaîne. Même si ça ne soigne rien, ça m'aide à ne pas penser, ou plutôt à rendre mes pensées positives. J'aimerais avoir des amis comme eux, un groupe solide, des liens sains, vivre dans un monde où rien n'est véritablement grave, où rien de terrible ne dure, où la douleur est toujours un prétexte à rire à nouveau.

Mais à quoi bon le cinéma et les séries, puisque la vie ne sera jamais aussi bien ?

samedi 3 septembre 2011

Just another night in Nantes

Quelques constatations sur Nantes :

- Nous avons croisé une agence immobilière qui s'appelle Ataraxia, et tout de même c'est un excellent nom.

- On y trouve le tri-sac, c'est un peu la confrérie du sac poubelle jaune et bleu. Il y a des ambassadeurs, des tickets de rationnement, des journées de rendez-vous (si vous en ratez une, ça peut-être la catastrophe !), on se glisse des sacs sous le manteau. Je suis sûre qu'il en existe de la contrebande.

- Hier soir, nous sommes allés à un festival de jazz (les Rendez-vous de l'Erdre). Sur l'île de Versailles, beaucoup de personnes âgées installées devant une scène, mais pas de musiciens. Nous nous sommes installés avec eux, faisant confiance à leur goût forcément sûr. Au fil du temps, des gens (toujours âgés) ont continué à s'amasser devant la scène, mais toujours sans concert. C'est en les observant que nous avons compris : à n'en pas douter, il s'agissait d'un concert réservé aux personnes âgés (un peu comme les sonneries de portables en ultrasons), que seuls les presbytes et les personnes qui possèdent une mauvaise ouïe peuvent voir et entendre ! Comme quoi, l'innovation ne se trouve pas que dans les capitales.

Modification de l'espace-temps

Depuis 10 jours l'espace s'est étiré, le temps a ralenti, le métro est sorti de terre, le vent s'est levé (et le temps est changeant). Nous avons plongé dans un trou noir et autant vous dire que la vie à l'intérieur y est plus douce. Je recommence à dessiner une nouvelle cartographie, constatant en chemin que je n'ai gardé presque que de l'amertume de ces six ans d'exils - ou plutôt, ma nostalgie concerne peu les êtres humains -. Ça n'effacera pas la tristesse et les regrets, mais je les laisse de côté, loin de mes yeux, dans les mains des autres. En quittant Paris, j'ai perdu plus de choses que je ne l'avais prévu, et si c'est un manque douloureux, j'espère que cela rendra mon terreau plus fertile.

C'est inquiétant et excitant bien sûr, marcher dans des rues qui sont aussi les miennes désormais, mais n'ont encore rien de familier, réfléchir à des ruses pour se faire des amis - névrosés ou psychotiques uniquement, j'ai pris congé des pervers -, observer la ville, humer son air, son vent marin. Il n'y a pas grand chose que j'aime davantage que découvrir une nouvelle ville, la rendre familière, apprendre le nom des rues, comprendre l'organisation de ses axes, découvrir puis construire mon paysage, choisir mes librairies, mes cafés, mes cinémas, mes parcs, ma boulangerie.

J'ai aimé construire Paris ces six dernières années, désormais je construis Nantes.

dimanche 17 juillet 2011

Passer son temps à se décevoir

Ces derniers mois, j'ai passé beaucoup de temps à admettre des choses que je savais mais me cachais consciencieusement. Des trucs douloureux, effrayants, qui me remettent en question. J'apprends à accepter que je me suis menti pendant des années, que j'ai refusé de voir des choses évidentes, de me questionner, d'interroger le comportement de mon entourage. Je mets côte à côte des événements bizarres, des souvenirs désagréables, des moments de malaise et tout se relie dans un mélange écœurant mais évident.

Sans doute parce que je suis inhibée, discrète, et du coup, plutôt à l'écoute, j'ai souvent attiré des personnes volubiles et égocentriques, envahissantes et manipulatrices, à qui je donne un peu malgré moi, l'espace qu'elles recherchent. Et j'en ai assez, je veux des amitiés équilibrées, pas toxiques, juste normales. Pit me dit qu'en changeant, j'apprendrai à aller vers des personnes saines, à éviter les pièges. Mais c'est difficile de se dire que ça tient à nous, pas aux autres, reconnaître que même si je les détectais, j'ai toujours eu une attirance pour les manipulateurs, une sorte de fascination. Alors je prends des notes, j’inscris mes constats et mes interrogations dans un carnet, à l'attention de mon ou ma futur(e) psy. Je changerai.

C'est effrayant de voir le temps qu'il nous faut pour changer, pour accepter le malaise, se dire que l'on n'est pas heureux. J'ai l'impression de passer mon temps à me décevoir ; mais je suppose que c'est un bon point de départ.

vendredi 17 juin 2011

Travailler est un arrachement

Quelquefois, travailler est un véritable arrachement. Je n'ai personne pour me l'imposer, ni bureau, ni ambiance de travail pour me stimuler et une satisfaction plutôt relative. Alors pour rester concentrée, pour m'y plonger, je dois m'extirper de la langueur et de l'errance de mon esprit. Capturer mes pensées pour les enfermer dans le travail, leur interdire de s'éparpiller. Et c'est sans doute le plus dur, ce qui prend le plus de temps : se mettre au travail. Une fois que l'on a démarré, les choses s'organisent naturellement, il nous emporte et capte nos pensées.
Mais ces longues heures d'errance m'épuisent et m'abattent. Je regarde mon écran d'ordinateur, mes papiers, mes carnets et je me sens vidée, sans énergie, sans volonté. J'entends seulement cette petite voix qui me dit de me mettre au travail, qui me rappelle que si je ne travaille pas, je ne gagne pas d'argent, et m'immobilise, me pétrifie au lieu de m'encourager. J'ai bien trouvé un ou deux antidotes, mais il me reste à les apprivoiser eux-aussi.

dimanche 12 juin 2011

La vie n’est qu’une recherche de doudous

Il y a quelques jours, Pit et moi avons fait notre première sortie ensemble au Mcdo. Et tout en se recouvrant les mains de graisses, nous nous sommes dit que le Mcdo, c’est de la bouffe-doudou. Rassurante, accessible, sucrée, douce. Comme les bonbons ou le chocolat d’ailleurs, ou les trucs qu’on mangeait enfant. Tout peut mal tourner, il restera toujours le McChicken et les potatoes.

Les jours suivants, j’ai réfléchi à cette idée et je me suis dit qu’en réalité, il ne s'agit pas que du Mcdo et des bonbons : toute la vie n’est qu’une incessante recherche de doudous. Le passé de Pit est son doudou, mes blocages et l’ignorance de leurs causes sont mes doudous. C’est tellement plus rassurant de s’y reposer, d’en faire des certitudes, des irrévocabilités comme le mcdo, plutôt que lutter contre eux ou de les quitter, d’affronter la nouveauté, l’étranger, le hors-soi. Je crois que ce à quoi on aspire en grandissant et en allant mieux, ce n’est pas à abandonner nos doudous, ni à en trouver de meilleurs, de plus tangibles ou plus actuels, mais c’est à devenir nous-mêmes nos propres doudous.

lundi 6 juin 2011

Il est temps de partir

Il y a un mois, Pit m'a emmenée passer une nuit dans une cabane dans un arbre. C'était magique.

Les retours à Paris me sont chaque fois plus difficiles, un arrachement à la douceur, un plongeon dans un bain d'épines. Comme si j'étais déjà partie, ces derniers jours étaient propices au bilan. Un bilan d'une couleur pastel un peu moche, teinté de mélancolie. Qui dit il est temps de partir, ici, tu ne cherchais pas les bonnes choses. Et celles dont tu croyais te débarrasser la première fois, elles sont toujours là parce qu'elles sont en toi.
Avec les autres, je flotte, mais pas comme un fantôme fluet, je flotte lourdement, je retombe à chaque instant. Je ne suis plus là avec vous, je suis par terre, sous vos pieds et je me demande comme faire pour que vous me voyiez là où je suis, et pas que mon ombre qui se reflète au-dessus de vous.

Je crois qu'on finit par aimer nos inaptitudes, qu'on a besoin de s'enorgueillir de ce que l'on n'arrive pas à faire pour s'en sortir sans. Mais quelquefois, je doute de moi et j'en viens à envier l'aisance des autres, leur facilité à être ensemble, à se parler, à exister au sein du groupe.

La difficulté à se mêler au groupe passe toujours pour du mépris, même aux yeux de ceux qui devraient bien nous connaître. C'est un constat d'échec : on ne pourra jamais vraiment se comprendre. Et c'est si triste.

lundi 2 mai 2011

Je n'arrive pas à rentrer à Paris

Je n'arrive pas à rentrer à Paris, à me remettre au travail, à reprendre ma vie comme je l'avais laissée deux semaines plus tôt. Je flotte, au-dessus de mon travail, je n'arrive pas à réinvestir mon appartement. J'ai pourtant rangé mes affaires, fait des courses, dormi dans mon lit, repris ma place devant l'ordinateur, mais je ne me sens pas encore tout à fait rentrée.

Hier soir, j'avais l'impression de revenir dans un endroit quitté depuis longtemps, un endroit qui fait partie du passé chargé de vieux souvenir mélancoliques. J'étais heureuse de retrouver tous les livres étalés par terre, les chocolats et les poèmes de Ted Hugues et de Sylvia Plath ramenés de Londres, comme lorsque je retrouve de vieux trésors égarés dans ma chambre d'enfant. Mais mon premier réflexe, une fois mes affaires déposées, a été de ressortir. J'ai flâné, traîné dans le vide-grenier de la rue Botzaris jusqu'à ce que tous se mettent à ranger leurs stands, en regrettant de ne pas avoir la place d'héberger une platine vinyle.

Et puisqu'aujourd'hui est journée éternuements (à cause de mon allergie imaginaire), l'envie de fuir et la mélancolie sont plus fortes encore. C'est fou ce qu'on est à l'étroit ici.

samedi 2 avril 2011

Ton coeur

Je voudrais kidnapper ton cœur pour le mettre en lieu sûr. Là, dans ton corps, je sais qu'il n'est pas en sécurité. quelqu'un peut le blesser, le percer, ou l'écraser. J'aimerais le déposer dans un écrin capitonné, qui ne laisserait pas passer la douleur. Et ni moi ni personne d'autre ne pourrait plus l'abîmer. Alors bien sûr, il resterait fragile, sensible et délicat, il resterait un peu blessé parce c'est qui il est ; mais il ferait de ses blessures un habit, une tenue de bonne qualité, bien cousue et durable, plus confortable et plus solide que la meilleure des armures.

mardi 29 mars 2011

L'orage est l'allié des gens fragiles

Il pleut. Et c'est une jolie pluie de printemps, fugace et irrégulière. De grosses gouttes, avec un bel orage, bruyant et lumineux. C'est le premier de l'année et je lui ferais bien une haie d'honneur pour fêter son retour. J'ai toujours eu peur de l'orage (surtout dans la maison de mes parents), mais je l'aime aussi formidablement, parce qu'il me semble être le seul capable de remettre à leur place les imbéciles, les arrogants, les présomptueux et les sûrs-de-soi. L'orage est l'allié des gens fragiles, des angoissés, des timides, des chétifs et de ceux qui doutent. Il rétablit la justice : face à lui, tout le monde est ridicule.